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Aventures françaises du séquençage SARS CoV 2

Au début de la pandémie, la pratique du séquençage n’était pas très répandue en France.

Il suffisait de compter pour chaque pays, le nombre de séquences renseignées dans GISAID, la data base internationale de stockage des séquences du SARS CoV 2. (cf. article de libération : https://www.liberation.fr/sciences/2020/12/23/sequencage-du-virus-un-retard-francais_1809477)

Cependant certaines mutations d’intérêt comme la mutation D614G dans le gène Spike avait été observée dès la première vague comme ayant la capacité d’augmenter l’excrétion virale et la contagiosité des souches porteuses de cette mutation. Depuis, toutes les souches isolées présentent cette mutation. 

Lors de l’apparition des différentes vagues de nouveaux variants ont été décrits et évolué depuis les premières souches de Wuhan. 

Malgré ces éléments, il a fallu attendre le mois de décembre, lorsque le variant dit « anglais » a occupé le terrain épidémiologique et également médiatique en France, que les lacunes du système de surveillance virologique français étaient patentes. Ceci, malgré les recommandations de l’ECDC qui préconise 5-10% d’échantillons positifs devant être séquencés.

Dès janvier, une réelle prise de conscience a eu lieu : les 2 CNR et certains CHU ont commencé à séquencer le virus de façon plus routinière que par le passé. La trac du « variant anglais » ou B.1.1.7 avait commencé notamment à l’aide d’un « pré-screening » réalisée à l’aide de la technique Thermo Fisher…

Cette technique a pour particularité de présenter un défaut de détection d’une cible dans le gène S en présence de ce VOC ou « variants of concern »; c’est à dire ces variants qui présentent soit une létalité accrue, une contagiosité plus importante, une présentation clinique différenciante ou sensibilité diminuée à l’immunité naturelle ou vaccinale, ou même simplement un défaut de détection de certains tests de dépistage. 

C’est alors que les techniques de criblage ont vu le jour : il ne s’agissait plus de détecter des mutations « par erreur » comme avec la technique Thermo Fisher, mais de développer des tests spécifiques de screening de chaque mutation d’intérêt. Dans d’autres territoires ultramarins, comme la Guyane ou la Réunion, les variants « brésiliens » (ou B.1.248 ou P1 ou V3) et « sud-africains » (ou B.1.351 ou V2) se sont répandus, du fait de leur proximité avec le Brésil et l’Afrique du Sud respectivement. Ces variants présentant comme le variant anglais la mutation N501Y, mais également la E484K, les autorités sanitaires se sont mises à surveiller de façon plus rapprochée ces nouveaux « VOC » très vite suspectés à raison de présenter une sensibilité diminuée aux vaccins.

La France décide donc de surveiller les VOC non pas en séquençant 10% des souches mais en « criblant » 100% des échantillons positifs. Le criblage initialement mis en place a ensuite évolué par 2 fois : 

  • Février 20201 : détection du variant anglais « V1 », vs. variants sud-africain ou brésilien V2/V3 grâce aux mutations del69-70 et N501Y.
  • Avril 2021 : détection des souches porteuses de la mutation E484K, menaçant l’efficacité de la vaccination.
  • Juin 2021 : détection des souches de sensibilité diminuée aux vaccins et des nouveaux lignages indiens (B.1.617.1, B.1.617.2, et B.1.617.3 classés VOC fin mai par PHE et SpF) par les mutations E484K, E484Q, et L452R.

Grâce à une innovation sans précédent, les premiers patients sont vaccinés en Asie, Europe et aux USA dès janvier. L’efficacité de ces vaccins est suivie de près dans les études de phase II/III mais également dans les études en « vie réelle », à l’aune de l’apparition de ces nouveaux variants qui n’avaient pas été pris en compte initialement au moment de la conception des vaccins. L’émergence de souches de sensibilité diminuée aux vaccins est suivie dans le monde entier, et certains pays décrivent une légère augmentation par sélection des variants V2 (cf. en France).

En France, 4 grandes plateformes dédiées (les CNR de Pasteur et de Lyon, les services de virologie : Henri Mondor de Créteil et l’IHU) s’organisent pour centraliser le séquençage issu de chaque région, une NABM spécifique séquençage (cotation 9007, B741) est publiée mais inutilisable pour les laboratoires privés qui restent exclus du séquençage. 

En effet, les indications NABM sont inapplicables en l’état, et l’obligation est ordonnée aux laboratoires privés d’envoyer leurs souches à séquencer dans les 4 plateformes dédiées.

Aujourd’hui les derniers verrous constituant l’interdiction pour les laboratoires privés de séquencer leurs souches sont en train de sauter. Un appel à projet national émanant d’EMERGEN-SPF a été lancé fin mai. Les laboratoires qui le souhaitent peuvent candidater afin de participer à la stratégie de surveillance nationale des variants d’intérêt. Espérons que ce projet naissant soit le début d’une collaboration fructueuse entre les laboratoires privés, publics et CNR qui n’a pas toujours été optimale depuis 18 mois,  afin de lutter plus efficacement contre le SARS CoV 2… 

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