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Consolidation de la validation biologique

Microscope, icone de la biologie médicale

Microscope, icone de la biologie médicale

 

 

 

 

 

 

 L'arrêt de la Cour de Justice de l'Union Européenne (CJUE) du 16 décembre 2010 validant le cadre spécifique d'exercice médical (en opposition à un modèle industriel contraire aux intérêts des malades) de la biologie médicale française repose sur la preuve reconnue du caractère médical de la profession de biologiste médical. La réforme de notre profession a souhaité consolider le rôle primordial du biologiste médical à toutes les étapes d'un examen de biologie médicale et notamment au cours de la validation biologique.

Cette validation correspond à une interprétation médicale de l'ensemble du bilan au vu des données cliniques, complétée par la prestation de conseil du professionnel de santé reposant sur son expertise. La Cour de Justice a reconnu la proximité étroite des biologistes avec les médecins cliniciens et ainsi leur rôle majeur dans la prise en charge du patient au centre de la chaîne de soin, rôle unique dans le monde qui est l'une des spécificités qui font rayonner la médecine Française dans le monde.

En conséquence, le texte en préparation sur la validation biologique se doit de respecter l'esprit du législateur et de maintenir un niveau d'excellence sur cette partie post-analytique, en réaffirmant notre compétence de spécialité médicale. Nous sommes observés de près par la commission européenne d'une part et les lobbys financiers d'autre part, et tout assouplissement nous conduirait subséquemment à un nouveau contentieux.

Le SJBM est en accord avec cette nécessaire consolidation de la responsabilité et de l'expertise des biologistes médicaux dans le texte de l'arrêté qui précisera les conditions de cette phase post-analytique en particulier en période de permanence des soins. Le but n'est à notre sens pas d'entériner la situation actuelle et ses nombreuses “tolérances”, mais bien de consolider la permanence du niveau de service médical rendu aux patients et de ce fait de rendre la validation biologique non délégable, de jour comme de nuit, en soin de jour comme en permanence des soins. Il n'est pas acceptable que le niveau d'excellence de prise en charge varie entre le jour et la nuit, il n'est pas concevable qu'un patient bénéficie de l'expertise d'un biologiste médical et de ses 10 ans de formation jusqu'à 18h29, mais plus à 18h30. La validation biologique doit, sans exception aucune, rester sous la responsabilité directe et exclusive du biologiste médical. Pas de délégation possible en son nom à un système expert informatisé (aussi bien paramétré soit-il) ou à un technicien aussi habilité et qualifié au sens de l'ISO 15189 soit-il.

Affirmer notre conviction est une chose, faire naître les conditions de son acceptabilité par la communauté des praticiens en est une autre, et c'est pourquoi après une consultation longue et consensuelle de ses mandants (en particulier hospitaliers et hospitalo-universitaires), le SJBM formule ici un certain nombre de propositions équilibrées, proportionnées, et dont la faisabilité est immédiate :

 

A- VALIDATION OBLIGATOIRE DE L'ENSEMBLE DES BILANS BIOLOGIQUES 24H/24 PAR UN BIOLOGISTE MÉDICAL

L'Ordonnance sur la biologie médicale impose une validation biologique avec une interprétation contextuelle. Cela rend impossible toute délégation de cette phase à un personnel non médical. Nous demandons donc le retrait de la tolérance actuelle du COFRAC dans son SH REF04, de libération des résultats en période de permanence des soins, ainsi que le retrait de la possibilité de validation par un système expert hors de cette période.

Tout bilan devra ainsi être validé physiquement, c'est à dire unitairement, par un biologiste médical afin qu'il puisse y apporter toute son expertise médicale à tout moment du jour et de la nuit.

Nos solutions pour garantir la faisabilité de cet objectif sont :

- LBM privés :

Compte-tenu des fusions actuelles, la taille des laboratoires s'accroît très nettement. Le nombre de biologistes exerçant au sein d'une même entité va croissant avec ces restructurations. Ainsi les laboratoires privés ayant une contrainte de permanence de soins sont en mesure, par réorganisation interne, de mettre en place cette validation 24h/24 (le cas échéant lorsqu'ils prennent en charge l'activité d'une clinique, d'un hôpital ou d'un dispensaire susceptible d'accueillir des patients dont le pronostic vital peut être engagé).

- LBM des centres hospitaliers (CH et CHU) :

Les CHU disposent d'un pool de biologistes et d'internes en biologie médicale parfaitement compétents afin de prendre en charge cette validation en continu. Pour les centres hospitaliers où le nombre de biologistes est limité, nous proposons également plusieurs solutions à la fois efficientes et rapides à rendre opérationnelles :

1- Une meilleure répartition des internes dans les inter-régions avec la possibilité d'un plus grand déploiement et responsabilisation accrue des internes sur les différents CH, en privilégiant ceux qui rencontrent des difficultés d'organisation pour la validation, tout en s'assurant, lors des commissions de répartition, de la bonne valeur pédagogique du stage.

2- La mise en place d'une validation à distance :

- soit dématérialisée pour les biologistes médicaux d'astreinte, c'est à dire pas nécessairement à l'endroit où sont réalisés physiquement les examens pour autant que l'accès à tous les paramètres techniques et analytiques soit garanti à distance.

- soit par une validation centralisée au niveau du CHU de proximité ou d'un regroupement de CH. Là encore, il est envisageable de faire participer à ces pools de garde les internes en biologie médicale (selon leur souhait et l'aspect pédagogique), les biologistes hospitaliers et si souhaité les biologistes du privé exerçant sur la localité, sur le modèle des pools de garde des autres spécialités médicales.

Il existe pour cela des moyens techniques très simples d'utilisation et peu onéreux pour garantir cette validation en continu 24h/24 :

- mise en place d'un réseau VPN (réseau privé virtuel)

- l'installation de logiciels (ex : TeamViewer, LogMeIn...) permettant de prendre la main à distance et de façon sécurisée sur des ordinateurs distants...

L'ensemble de ces solutions ont l'avantage d'un déploiement simple, sans surcoût par rapport à la situation actuelle. Elles sont de plus en parfaite cohérence avec l'ordonnance et la norme 15189. Elles participent simplement d'une meilleure rationalisation et d'une optimisation des ressources existantes.

 

B- LES LOGICIELS “EXPERTS” NE SONT QU'UN OUTIL DE SUPPORT A LA VALIDATION

La spécificité française repose sur l'interprétation contextuelle d'un bilan par un biologiste médical et sur la prestation de conseil. Il est donc indispensable que l'intégralité des bilans fasse l'objet de cette double expertise médicale.

La validation clinico-biologique repose sur une validation globale de l'ensemble des résultats en prenant en compte une multitudes de paramètres qui dépendent eux mêmes des analyses demandées (individuellement et dans leurs ensemble).

Exemple :

- l'âge du patient

- son sexe

- contexte (grossesse ? chimiothérapie ? douleurs ? fièvre ?...)

- l'horaire de la prise de sang et du cycle menstruel (bilans hormonaux)

- la posologie et l'indication d'un traitement ou la cible thérapeutique (cas des anticoagulants et dosages de médicaments)

- la prise ou non de traitements

- la connaissance des pathologies chroniques du patient (diabète, hypercholestérolémie, maladie auto-immune...)

- l'interrogatoire du patient lors du prélèvement sur le motif de l'examen (information cliniques pertinentes obligatoires dans la norme 15189) et son anamnèse...

L'augmentation du niveau de qualité en lien avec l'accréditation des laboratoires nécessite une optimisation de cette phase critique post-analytique. La cartographie des risques au niveau de cette phase encourage donc à mettre en place le maximum d'outils de sécurité pour garantir une validation biologique optimale et interprétée au service de tous les patients. En cela, l'usage de logiciel d'aide à la validation ne peut en rien se substituer à la validation biologique car aucun logiciel ne peut aujourd'hui garantir au patient la revue de l'ensemble des critères évoqués ci-dessus.

Exemple : Validation d'un résultat de fibrinogène à 2g/l pour une femme enceinte à l'accouchement.

Un logiciel expert va valider ce résultat car il se trouve dans les “valeurs normales”. Un biologiste, lui, sera immédiatement en état d'alerte face à un résultat qu'il va juger potentiellement critique en raison de l'état clinique de la patiente (grossesse) et des éventuels éléments cliniques dont il dispose ou qu'il pourra par la suite rassembler. En effet une femme enceinte présente à l'accouchement des valeurs élevées de fibrinogène (état inflammatoire), un résultat à 2g/l peut de ce fait, dans ce contexte particulier, faire suspecter une CIVD. Devant ce résultat, le pronostic vital de la patiente peut être engagé. Le biologiste médical va ainsi immédiatement prévenir le médecin en charge de la patiente, et rajouter de sa propre initiative des examens complémentaires (facteur V, DDimères...).

Cet exemple de conséquences humaines d'une validation par un système expert d'une part et par un biologiste médical d'autre part parle de lui-même...

Nous pourrions les multiplier pour un grand nombre de situations.

Cependant, l'usage de ce genre de logiciel est à encourager car c'est une aide supplémentaire pour le biologiste qui doit valider dans un temps toujours plus contraint. La validation de dossier après une première revue par un logiciel expert optimisera le temps passé sur les dossiers en permettant d'effectuer une hiérarchisation des situations clinico-biologiques afin que le biologiste puisse se consacrer plus longuement aux dossiers le nécessitant, tout en garantissant à chaque patient l'égalité vis à vis de l'expertise médicale qui lui est apportée.

C'est la garantie d'un rendu de résultat apportant la plus grande plus-value médicale possible et en adéquation avec le motif de la prescription.
Imposer des règles exigeantes sur le pré-analytique et l'analytique comme cela n'a jamais été fait ne peut pas se faire en assouplissant paradoxalement le post-analytique qui constitue l’aboutissement de l'examen de biologie médicale ! La validation (et tout ce qu'elle recouvre) est le cœur même du métier du biologiste médical et le dernier verrou avant intervention sur le patient. Nous devons garantir, du prélèvement à l'interprétation du compte-rendu, un niveau d'excellence maximal.

 

Nous demandons donc au travers d'un décret sur la validation biologique de sanctuariser cet acte médical par définition comme étant un acte non délégable, avec :

1- validation biologique de l’intégralité des bilans et de façon singulière (validation indépendante de chaque bilan, pas de validation “en lot”) par un biologiste médical identifiable (sans aucune délégation), en encourageant l'usage des logiciels d'aide à la validation pour sécuriser cette validation dans un contexte économique qui oblige la profession à répondre à des volumes toujours plus élevés, mais pas pour s'y substituer.

2- validation biologique des bilans en continu 24h/24 dans le public et le privé, pendant et hors permanence des soins.

3- suppression de la tolérance de la libération des résultats non validés biologiquement, après une phase de mesures transitoires cadrées.


Le SJBM est conscient des efforts que devra continuer de consentir la profession afin de parvenir à cet objectif de validation biologique en continu de tous les bilans. Nous portons cependant en toute conscience la position de l'avenir de la profession, en mesurant pleinement les enjeux et les conséquences.

Nous demandons donc que figure dans la loi une position cohérente sur la validation biologique, sans aucune dérogation possible. Une période de mise en conformité devra donc être définie, mais elle ne pourra être que transitoire au sens de la loi.

Le Conseil d'Administration du SJBM

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